Mahmoud Darwich
La
terre nous est étroite. Elle nous accule dans le dernier défilé et nous nous
dévêtons de nos membres pour passer.
Et
la terre nous pressure. Que ne sommes-nous son blé, pour mourir et ressusciter.
Que n'est-elle notre mère
Pour compatir avec nous. Que ne sommes-nous les
images
des rochers que notre rêve portera,
Miroirs.
Nous avons vu les visages de ceux que le dernier
parmi nous tuera dans la dernière défense de l'âme.
Nous
avons pleuré la fête de leurs enfants et nous avons vu les visages de ceux qui précipiteront
nos enfants
Par
les fenêtres de cet espace dernier, miroirs polis par notre étoile.
Où
irons-nous, après l'ultime frontière ? Où partent les oiseaux, après le dernier
Ciel
? Où s'endorment les plantes, après le dernier vent ? Nous écrirons nos noms
avec la vapeur
Carmine,
nous trancherons la main au chant afin que notre chair le complète.
Ici, nous mourrons. Ici, dans le dernier défilé. Ici ou ici, et un olivier
montera de
Notre
sang.
1986
Photo D.R., Centre de rétention de Vincennes