Océania (Cinquième élément)
Le quatrième élément…
la terre à atteindre, le bord, la rive, la côte…
Aborder l’autre terre, la terre intérieure, la quête…
palper le terreau révélé par la traversée océane,
se connaître soi-même sans masque
assumer force et fragilité, sérénité et peur
affronter les dragons, les démons
passer la porte étroite, la porte basse
se regarder dans le miroir
y reconnaître l’ami et l’ennemi
être sans paraître
aimer
n’est-ce pas cela le cinquième élément ?
Alchimie subtile dans le creuset des quatre autres ?
Centre commercial de V..., je suis avec une amie,
nous allons d’un cube de béton à un autre cube de béton,
des voitures garées à l’infini sur l’asphalte entre les cubes,
les autres circulent, agressives, entre les clones consommateurs
les enseignes lumineuses clignotent fluo l’acide des fausses couleurs
des drapeaux commerciaux vulgaires claquent dans le mistral
il fait gris triste irréel métallique chromique
j’ai froid j’ai le cœur étreint je suis fatiguée
je ferme les yeux, je me retire, je vole vers toi
j’entends le bruit de l’eau sur la coque
le vent dans la voile
le gémissement du mât,
mon avant-bras goûte le sel
je lèche le vin du dimanche sur ton menton
nicotine du brin de tabac collé à tes lèvres
mon regard ne peut absorber l’immensité
il caresse l’épure de la voile
se mouille dans tes yeux
le vent joue avec mon corps
relief du pont sous mes orteils
ta main sur mon épaule
je respire dans ma paume l’odeur laissée par ton sexe
il sent l’air l’eau et le sel lui aussi, un sel de sueur
mêlés à mon odeur musquée femelle marine
Le temps s’est arrêté, nous sommes.
Toi qui n’es pas là, tu es le plus là
reçois ma douceur, ma joie profonde
de te savoir là, mon amour.
J’arpente mes terres le ventre vide
comble-moi, remplis-moi, scelle-moi
pénètre-moi, fais-moi femme,
donne-moi naissance, je suis inachevée
fais-moi crier de naître
fais-moi crier d’être.
Photo Océania