Paul Nizon
Je ne peux pas combiner
mon écriture avec lesdites exigences de la vie quotidienne, ou même la mettre
en harmonie avec elles. Il faut que je puisse m'y livrer de façon radicale.
Faut que je puisse ne plus démordre de la solitude de la production, me carapacer
avec mon écriture, et ce sans être en peine d'un gagne-pain. Faut que je puisse
vivre avec un livre en devenir, c'est-à-dire, me promener, dormir, rêver et
m'éveiller avec lui. Il faut que je sépare cette union localement et physiquement
du lieu où j'habite dans le quotidien, il faut que je loue spécialement une
chambre, de préférence une mansarde dans une maison étrangère — une chambre
dans laquelle ne se passe que «la vie avec le livre en devenir» et rien
d'autre.
In « La marche à l’écriture »
Photo Océania