Pierre Jean Jouve
Description
Le corps avait une
finesse de liane en même temps que la robustesse d'une tour, fortement établi
sur les jambes un peu disjointes tandis que, par une très légère cambrure des
cuisses, ressortait le bassin central. Les hanches minces, presque droites, ce
qui les rendait plus sensibles, l'abdomen largement étalé avec le nombril
creux, un pli horizontal marquant la naissance du torse, et celui-ci portant
en saillie deux seins petits et graves, d'une mollesse juste, les mamelons
brunâtres sur de larges aréoles. Ces seins à peine lourds, juvéniles et pleins,
pouvaient être couverts avec une main, mais résistaient par leur épaisseur
voluptueuse. Peu de duvet sous l'aisselle ; pour que le principal objet à
contempler, dès qu'elle avait été nue, fût la toison du pubis, violente,
frisée, d'un brun sombre et largement triangulaire.
Sous la chevelure noire,
un vrai casque, elle avait des yeux de poids semblable, occupés par un regard
pénétrant et triste, et un nez droit ayant à l'extrémité une pointe assez dure
comme les figures des vases grecs. De ses pieds longs, dessinés et sveltes, dont les
ongles étaient peints à l'or, jusqu'au creux des reins comme une vallée après
de souples montagnes, et de sa taille légèrement en urne jusqu'à ses épaules
plates : elle avait la certitude d'être un corps plutôt maigre comme il
convient à l'indécence, et sans défaut, et elle offrait volontiers à la vue la
blancheur sibylline de sa peau avec la considérable touffe. Le moindre
mouvement faisait sentir sous le galbe une familiarité barbare.
In
« Proses »
Photo Océania, Villa
Cimbrone, Ravello