Nicolas Bouvier

                                                                                                         Photo Too Banal         

Love Song III

Quand tisonner les mots pour un peu de couleur

ne sera plus ton affaire

Quand le rouge du sorbier et la cambrure des filles

ne te feront plus regretter ta jeunesse

Quand un nouveau visage tout écorné d’absence

ne fera plus trembler ce que tu croyais solide

Quand le froid aura pris congé du froid

Et l’oubli dit adieu à l’oubli

Quand tout aura revêtu la silencieuse opacité du houx

Ce jour-là

Quelqu’un t’attendra au bord du chemin

Pour te dire que c’était bien ainsi

Que tu devais terminer ton voyage

démuni

tout à fait démuni

Alors peut-être….

Mais que la neige tombée cette nuit

soit aussi comme un doigt sur ta bouche

In "Le dehors et le dedans"

Comments

[totem]

...beau texte,émouvant et limpide. Sans regret pour une jeunesse évaporée, sorbier rouge et cambrures des filles seront toujours la cause d'une émotion esthétique agréable...
"Nous aurons des lits creusés comme des filles dans le sable humain ..." Leo ferré

[agnès]

"Quand tout aura revêtu la silencieuse opacité du houx..."


Tu resteras dans l’inachevé
la parole suspendue
le non-dit sur tes lèvres scellées.

@

[amichel]

guide du routard
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jette ton haut de forme
tête nue

salue
le « je-ne-sais-quoi » et « le presque-rien »
le plein je le vide
le vide je le plains
cultive la fleur créatrice
de l'étincelle mère des étoiles innombrables
dans la nuit haute mer
navigue vers les confins du rêve
chasseur à  l'espère 
des oiseaux bleus du temps
à l'aurore
lance tes filets de rosée
à midi
bois le vin du soleil
au soir
repose dans le hamac de lune
innocent idiot
vagabonde avec les nuages
laisse ton coeur
jouer avec

le clavecin de la pluie
ouvre
les gages des joies musicales
délivre toi
de l'ennui
unie forme mitée
naît en néant
aux cris de l'orage
et fracasse les portes du ciel
puis entre
dans l'éternité du silence
et de la rose ...

[D. Hasselmann]

Par rapport au titre de ce blog, la référence à Nicolas Bouvier s'imposait.

On voyage dans sa tête, dans sa chambre, dans la ville, à la campagne, à la mer, à la montagne, dans le désert ou sur la lune un jour, en avion, à bicyclette, en voiture, à pied, on marche, court (et venge ?), les mots sont des cailloux à la Caillois, on en ramène parfois (j'ai un galet des bords du Loch Ness', il donne des frissons)...

[too banal]

Japon (Le vide et le plein) et du fameux "Usage du monde", je n'ai rien lu d'autre de Bouvier. J'aime bien chez lui la double dimension de l'auteur écrivain-voyageur et du photographe. Il serait intéressant de voir dans son écriture comment se fait le passage de l'écrit à l'image et vice versa...
Par certains côtés,il me rappelle un peu l'écriture de Gilles Lapouge dont un extrait se trouve ici :
http://toobanal.canalblog.com/archives/2008/03/02/8164102.html#comments
A bientôt et bon week end...