Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Voyage dans les mots
Voyage dans les mots
Derniers commentaires
31 mars 2008

Pierre Reverdy

Nymphe_cercle_2___Ammannati_1560_1575


Le cœur tournant

Il ne faut pas aller plus loin
Les bijoux sont pris dans la lyre
Les papillons noirs du délire
Remuent sans y penser la cendre du couchant

A peine revenu des voyages amers
Autour des coeurs jetés au fond des devantures
Sur l'avant-scène des prairies et des pâtures
Comme des coquillages nus devant la mer

A peine remué par l'amour de la vie
Des regards qui se nouent aux miens
Des visages sans nom des souvenirs anciens
Diamants de l'amour qui flottent sur la lie

Pour aller chercher au fond dans la vase
Le secret émouvant du sang de mon malheur
Il faut plonger la main aux racines du coeur
Et mes doigts maladroits brisent les bords du vase

Le sang qui jette sur tes yeux ce lourd rideau
L'émotion inconnue qui fait trembler ta lèvre
Et ce froid trop cruel qui emporte ta fièvre
Froisse dans tous les coins le linon de ta peau

Je t'aime sans jamais t'avoir vue que dans l'ombre
Dans la nuit de mon rêve où seul je peux y voir
Je t'aime et tu n'es pas encore sortie du nombre
Forme mystérieuse qui bouge dans le soir

Car ce que j'aime au fond c'est ce qui passe
Une fois seulement sur ce miroir sans tain
Qui déchire mon coeur et meurt à la surface
Du ciel fermé devant mon désir qui s'éteint


In, « Ferraille 1937 »
Sculpture : Nymphe de la Fontaine de Neptune, Ammanati 1560 - 1575  


Publicité
Publicité
Commentaires
Q
"Je t'aime sans jamais t'avoir vue que dans l'ombre<br /> Dans la nuit de mon rêve où seul je peux y voir<br /> Je t'aime et tu n'es pas encore sortie du nombre<br /> Forme mystérieuse qui bouge dans le soir"<br /> <br /> C'est très très contemporain, cette strophe. Je l'aime vraiment beaucoup. Elle peut si bien s'appliquer aux amours "nocturnes". <br /> Je crois que je vais utiliser cette strophe en guise de citation préambule à un de mes prochains romans (si je le termine.) Cela collerait si bien.<br /> <br /> Merci beaucoup :)
A
C'est un être rare, poète et ermite. J'écris "c'est" puisque l'on dit que les poètes ne meurent jamais ...
S
La brise d'avril a des effets lacrymogènes <br /> Sourire quand les gerçures saignent<br /> Tout reverdit rien ne se fane<br /> aussi bien que le mensonge<br /> L’oubli est un fleuve gelé <br /> Même les poches pleines de cailloux<br /> Ton incendie t'interdit ce buvard<br /> Poing dans les poches,<br /> les ongles marquent ta paume<br /> là même où tu déposais un baiser<br /> Pour les lèvres absentes<br /> Tes insomnies ont le goût des ricochets<br /> Tu plonges hagarde dans le jour qui vient<br /> Des papillons fiévreux dans les yeux<br /> Tu n'as rien dit
D
Ce poète, comme tombé dans l'oubli, alors que tout va reverdir. Ses mots n'ont pas subi l'assaut des saisons.
D
J'aime beaucoup les trois dernières strophes. Elles m'évoquent le poème de Desnos: "J'ai tant rêvé de toi.."<br /> <br /> Je trouve toujours étrange qu'au plus creux de nos rêves, l'on puisse aimer, et percevoir la chaleur, la présence, la texture d'un autre irréel. C'est troublant.<br /> <br /> Dans la bande dessinée "Le vagabond des limbes" c'est le thème de départ: comment peut-on se souvenir de quelqu'un qui n'existe pas?. Le héros commence alors un interminable voyage plein d'embûches pour trouver la porte qui lui permettra de rejoindre la femme dont il est épris au pays du rêve...
Voyage dans les mots
Publicité
Archives
Publicité